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Des ponts romains défient le temps dans l’Alentejo portugais

Les anciens Romains ont régné sur la majeure partie du territoire qui allait devenir le Portugal entre le 3e siècle avant notre ère jusqu’au 4e siècle de notre ère. Ils ont légué, entre autres, leur langue, des villes et de nombreuses infrastructures, comme un vaste réseau routier formé de routes et de ponts. Outre leur recette de ciment, les Romains ont perfectionné leur technique de la voûte pour la fabrication des ponts en pierre. Dans l’Alentejo, région fortement romanisée, beaucoup de ces anciennes infrastructures sont encore utilisées de nos jours, des milliers d’années après leur construction! Des ponts construits par les Romains qui ont résisté à l’usure du temps, l’on en recense des centaines. En effet, un inventaire des ponts romains indique que plus de 330 ponts en pierre disséminés en Europe sont toujours ouverts à la circulation. Connus pour leur longévité, la plupart des ponts romains, formés d’arcs en plein cintre, ont été construits avec des cendres volcaniques, de la chaux et du gypse.     

Les ponts ont été érigés par les Romains pour répondre aux besoins de l’armée et de l’économie de l’empire. Longtemps après la chute de l’Empire, les techniques romaines de construction de ponts ont été reproduites au Portugal et dans toute l’Europe. En fait, certains ponts dits « romains » n’ont pas été construits dans l’Antiquité; leur facture reprend la technique de fabrication romaine. À l’âge des découvertes, période entre les années 1400 et 1600 où de grandes explorations maritimes ont été entreprises par le Portugal, le modèle du pont romain s’est répandu en Asie, en Amérique et en Afrique.
Les anciens Romains commençaient la construction d’un par une fondation en pierre dans des murs étanches. Ils détournaient souvent des rivières pour mieux asseoir les piles du pont dans le lit du cours d’eau. Il a été récemment démontré que leur ciment était plus solide et résistant que celui que nous utilisons de nos jours.

Pour les Romains, l’Alentejo représentait un grenier à blé, une céréale fondamentale à l’Empire. Puisque le pain était offert gratuitement aux citoyens de la Rome antique, l’approvisionnement en blé était donc nécessaire. Le blé de l’Alentejo a été au cœur de la romanisation de la Lusitanie, cette région qui couvrait la plus grande partie de l’actuel Portugal. Pour l’acheminer vers les villes, il fallait un bon système de routes et de ponts. Durant la guerre civile romaine qui opposa Jules César à Pompée, Évora (Ebora en latin) est restée fidèle à César. En retour, elle a été récompensée par le titre honorifique de Ebora Liberalitas Julia.

À Mértola (Myrtilis Iulia, nom romain), ville portuaire d’importance historique en amont du fleuve Guadiana, les piliers d’un pont permettaient jadis d’accéder à une tour de contrôle du débit du fleuve. Cette voie d’accès, construite sur une solide série d’arches, reliait la tour à la ville et à ses marchands. Les vestiges se trouvent encore sous les remparts de Mértola.

À Mirobriga Celticorum, une antique cité romaine près de la côte, l’on aperçoit un pont composé d’une seule arche qui permet de traverser la route ouest-est menant à la ville, aujourd’hui partiellement fouillée par les archéologues. Le pont est construit en pierres à chaux et les pavés romains sont encore intacts.

Le pont de Vila Ruiva enjambe la rivière Odivelas dans la municipalité de Cuba. Il faisait partie de l’ancienne voie romaine qui reliait Ossonoba (Faro de nos jours) à Pax Iulia (Beja à présent) et suivait Ebora (Évora). Le pont original, fait de granit local, date du 1er siècle avant J.-C.; il a subi des réparations au 5e et au 11e siècle. Le pont est toujours en service, signe que sa construction est solide.

Le pont Vila Formosa, qui traverse la rivière Seda, est dans un état remarquable. Cette construction du 1er siècle de l’ère chrétienne reliait la capitale régionale de Mérida à Olissippo (Lisbonne). L’on peut toujours le traverser. Il y a un petit stationnement et une aire de pique-nique sur votre droite, à environ 100 mètres avant d’arriver au pont. Le pont est composé de huit arcs en plein cintre destinés à le protéger durant les inondations, une conception courante utilisée par les Romains. 

Le pont Ribeira Grande de Monforte, un pont sur chevalets doté de cinq arches, se trouvait sur une route romaine qui reliait Lisbonne à Mérida. On pense qu’il remonte au temps de l’empereur Hadrien. Très bien conservé, il est toujours très utilisé.


Le pont romain d’Alvalade, près de Santiago do Cacem, reliait autrefois les villes de Miróbriga et de Pax Iulia (Beja) en passant par Vipasca (Aljustrel). Objet de travaux de restauration en 2001, il peut être traversé à pied.

Un pont romain a été submergé par les eaux du barrage de Pego do Altar pendant deux décennies. Le pont encore intact, situé près d’Alcácer do Sal, peut être aperçu lorsque le niveau de l’eau baisse, à l’image d’un antique village écossais fantastique qui resurgit tous les cent ans dans le film Brigadoon.

Le pont Nossa Senhora da Enxara enjambe la rivière Xévora près de la ville fortifiée abandonnée d’Ouguela, non loin de Campo Maior. De ce pont en ruines au passé flou, il ne reste qu’une arche intacte. Il se trouvait sur une voie romaine qui reliait la capitale provinciale, Emerita Augusta (Mérida), à Olisipo (Lisbonne). La région, superbe, plaira assurément aux adeptes de la randonnée.

Le pont Antiga do Xarrama, situé non loin d’Évora, à la Herdade da Chaminé, traverse la rivière Xarrama. Ce pont en ruines, dont il reste que trois voûtes rondes et le reste d’une section transversale rectangulaire, a été fabriqué avec du granit et présente une belle maçonnerie sur les portées et les murs. Il dispose d’un tablier doté de gouttières pour évacuer l’eau de pluie.


Selon la tradition, le pont de Portagem, qui enjambe la rivière Sever, était l’un des péages établis par le roi D. João II (1455-1495), pour taxer les juifs expulsés de Castille et d’Aragon, en Espagne, à leur entrée au Portugal. Ce pont était à l’origine intégré à une route romaine. Bien des légendes entourent ce pont. Sa construction serait liée à un pacte avec le diable, un récit curieusement commun aux ponts antiques de la péninsule ibérique, en particulier ceux d’origine romaine.

Juste au nord du village de Fronteira, sur la route menant à Alter do Chão, se dresse un ancien pont composé de dix arcs en plein cintre. Le pont de Ribeira Grande est considéré comme romain, non seulement par sa facture, mais aussi parce qu’il franchit une route romaine. La zone environnante est aujourd’hui une plage fluviale aménagée pour y apporter son pique-nique.

Cabeço de Vide est un village situé sur le versant sud d’une colline, qui s’étire sur une plaine considérée comme la plus large entre les fleuves Tage et Guadiana. Les Romains y ont prospéré pendant plusieurs siècles, et la route principale reliant Lisbonne à Mérida passait également par là. Cabeço de Vide est connue pour sa station thermale (« Termas da Sulfúrea » ou thermes d’eau sulfureuse) et pour ses vestiges d’anciens bains romains qui remontent sans doute à l’époque de César Auguste. Un minuscule pont en ruine se dresse encore sur le site de l’actuelle station thermale.

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