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Découvrir l’Alentejo et y dénicher une résidence


À la fin décembre 2013, nous avons quitté l’Arabie saoudite pour atterrir au Portugal. Puis, au volant d’une voiture de location, nous avons pris la route pour finalement nous arrêter à Caiscais. Je ne saurais dire si le décalage horaire y est pour quelque chose, mais j’ai cru que nous étions arrivés au paradis. 

Vraiment!

La montre indiquait 15 heures. Nous sommes entrés dans un restaurant et avons pris place devant l’océan. Une brise rafraîchissait l’air. On nous a portés des plats chargés de délicieux fruits de mer que nous avons arrosés d’une bouteille de vin blanc maison, le vin le moins cher, mais ô combien délectable. 

Non loin, une dame chantait du fado pendant que les rires fusaient des tables où le personnel marquait une pause en mangeant ensemble. Personne ne semblait pressé par le temps.

De notre table, nous avons admiré le panorama en sirotant le vin et en respirant à pleins poumons l’air iodé. Après avoir bourlingué le monde et visité plus de 60 pays, l’idée de poser nos valises au Portugal nous a traversé l’esprit.

En l’espace de deux heures, les charmes de Cascais nous ont ensorcelés. Cet endroit merveilleux a conquis notre cœur.

Repus et en état contemplatif, nous avons soudainement pris conscience qu’il nous restait deux semaines de vacances.  Chaque jour est venu renforcer cette première impression mémorable. Où que nous allions, le Portugal, ce joyau jusqu’alors inconnu, nous réservait de magnifiques surprises et bien des plaisirs.  

Le lendemain matin, nous avons pris la route et mis le cap sur la péninsule de Peniche, au nord de Lisbonne. Du haut de Peniche, à l’extrême ouest de la péninsule du même nom, la vue embrasse l’immense panorama de l’océan.  Nous avons remonté la côte vers le nord pour accéder au paradis du surf qu’est Nazaré, un typique village de pêcheurs. Les vagues sont tantôt paresseuses, tantôt gigantesques, parmi les plus vertigineuses du monde, au grand bonheur des adeptes de surf.  Puis, nous avons poursuivi notre exploration à l’intérieur des terres pour nous diriger vers un petit village.  En fait, le village, en bonne partie désertée, est devenu la propriété de Villa Pedras qui restaure peu à peu les maisons pittoresques pour en faire des demeures de vacances.

Nous avons choisi Villa Pedras comme lieu de séjour provisoire (cinq jours) pour arpenter Coimbra et ses environs.  Peu à peu, on s’attend à trouver des bourgades et des cafés à chaque tournant. Peu à peu, on s’accoutume à un rythme tranquille et à un climat bon enfant. Un détail avait attiré notre attention sans que nous ne puissions rapidement l’exprimer en mots. Puis, la révélation : l’absence de chaînes de magasins! Macdo, Costco, WHSmith, Starbucks et compagnie brillent par leur absence!  C’est que chaque ville se distingue par sa rue principale et sa sélection de boutiques et de lieux de restauration.  N’est-ce pas réconfortant de trouver quelque chose de différent dans chaque petit village où l’on fait une halte?

Pour Noël, nous nous sommes rendus à Évora.  Arrivant par le nord, nous sommes entrés dans la ville fortifiée pour nous diriger vers un hôtel haut de gamme : 24?xxx.  Là, le déclic s’est produit. Si nous nous sentions si bien au Portugal, l’explication tenait à la grande amabilité des gens.  Nullement insistants, les gens sont serviables et authentiques.  

Quand vous commencez à échanger avec les gens du peuple, vous vous rendez compte qu’ils ont vraiment à cœur de se rendre utiles. Ils n’hésiteront pas à vous recommander des restaurants, à vous suggérer les attractions que vous ne devriez pas rater. Imperturbables au temps qui s’écoule, ils semblent avoir tout leur temps pour discuter avec vous et résoudre votre problème avant de poursuivre leur chemin.

Nous avons entamé la nouvelle année en voyageant jusqu’à la côte sud-ouest d’une beauté époustouflante.  Nullement bondée, elle s’est révélée tout aussi accueillante que les autres endroits que nous avons eu la chance de visiter.   Au terme des cinq jours, nous avons convenu d’un commun accord que nous reviendrions dans un proche avenir au Portugal. Deux semaines plus tard, notre vœu était unanime : s’établir dans l’Alentejo, une région qui dégage une sérénité paisible.

La recherche d’une demeure dans l’Alentejo


Nous sommes rapidement revenus dans l’Alentejo, plus précisément en avril 2014. L’aventure a débuté avec la recherche d’un endroit où vivre et lancer une entreprise. Nous avions le projet d’ouvrir un petit hôtel, de tenir un café-bistrot et pourquoi pas, une boutique d’artisanat.

Nous ne savions pas où exactement, mais une chose était sûre : ce lieu devrait se trouver dans la région d’Évora.  Nous avons donc séjourné à Évora pour ratisser chaque jour le secteur à la recherche d’une vieille maison de ferme, d’un bâtiment ou même de ruines convenant à notre projet moyennant des rénovations.  Chaque fois que nous trouvions un endroit potentiel, nous notions les numéros figurant sur des panneaux rouges (en forme de diamant) installés sur les terrains (un moyen astucieux à nos yeux d’identifier les terrains).  

Après deux semaines de recherches, nous sommes rentrés à Lisbonne et avons montré à notre avocat, non sans fierté, toutes les photos que nous avions prises des panneaux rouges d’« identification de la propriété ».  Gentiment, patiemment, il nous a expliqué que nous avions photographié des permis de chasse locaux. Ces numéros n’avaient rien à voir avec l’identification de la propriété. Jamais, nous ne nous sommes sentis aussi ignorants et naïfs!  

Enfin, le bon côté de l’histoire, c’est que nous devions retourner dans l’Alentejo. Et c’est ce que nous avons fait.  Si ma mémoire est bonne, nous y sommes allés à cinq reprises en 2014 sans parvenir à dénicher l’endroit propice!   La situation s’annonçait triste. Lors de notre dernier voyage en octobre 2014, Vicki a vu l’annonce d’un endroit situé au sommet d’une colline, dans l’enceinte du château, mieux à côté du château!

Nous nous sommes rués sur place avec nos amis du Royaume-Uni. C’était la première fois que nous allions à Evoramonte. Nous avions plusieurs fois fait le trajet Évora-Estremoz et visité les environs, mais nous n’avions jamais mis les pieds à Evoramonte, Dieu sait pourquoi.

L’établissement à vendre était en partie un café, en partie une pension avec des chambres inutilisées.  Nous sommes entrés pour prendre un café. Là, la terrasse offrait une vue imprenable sur les oliviers et les chênes-lièges en contrebas.   Il y avait un vieux moulin, une route légèrement sinueuse et des paysages défilant sur des kilomètres et des kilomètres, lovés contre des montagnes au loin, à l’ouest. Précisément là où le soleil avait commencé à tirer sa révérence en faisant rougir le ciel.

Vendu!

La vue initiale de l’endroit (« The Place »)


C’était un dimanche. Aucun agent immobilier n’était joignable. Tôt le lundi matin, nous avons trouvé un agent immobilier qui nous a fait faire la visite officielle des lieux à Evoramonte.

L’endroit, formidable, présentait beaucoup de potentiel.  Une fois rentrés au Royaume-Uni, nous avons communiqué avec notre avocat à Lisbonne pour faire une offre qui a été acceptée.  Nous devions à présent vendre notre maison à Londres pour payer celle d’Evoramonte.   Les fêtes de Noël et du Nouvel An plus les retards administratifs ont fait en sorte qu’il nous a fallu attendre mai 2015 avant que les fonds ne soient débloqués pour nous rendre à Évora pour la signature officielle et le paiement.  

Une fois le processus d’achat terminé, nous sommes retournés à Evoramonte nous asseoir sur la terrasse contempler le soleil couchant en savoureux un verre de mousseux local.  

Parfait!


Nous pensions trouver rapidement un entrepreneur en construction pour les rénovations et lancer notre entreprise avant la fin de l’année. Oh oh! Du calme M. et Mme Webber! Bienvenus dans la bureaucratie portugaise!  

Mitch assis en train de porter un toast pour l’acquisition de la propriété

La bureaucratie


Papel. Le mot portugais désignant le « papier ».  Il existe une règle tacite dans la bureaucratie portugaise selon laquelle il ne faut jamais approuver quelque chose au moyen d’un seul document si l’on peut le faire avec sept!  Et un paragraphe stipule qu’il ne faut jamais exiger un sceau unique ou une seule signature sur un document, s’il est possible de requérir deux signatures. Deux signatures provenant de deux ministères situés dans deux villes. 

Voici un exemple, l’un parmi de nombreux que je pourrais vous donner. Nous en sommes venus à nous munir de trois classeurs remplis de documents dûment scellés et signés.

Nous sommes allés à la mairie d’Estremoz fournir une attestation de vie pour effectuer le changement de nom pour les services de fourniture d’eau et d’électricité. On m’a demandé de fournir la preuve que j’étais un citoyen de l’Union européenne (UE). Facile! J’avais un passeport du Royaume-Uni qui faisait encore partie de l’UE en 2016. Mais cela ne suffisait pas! Mon interlocuteur m’a informé que je devais obtenir un certificat de la mairie du Royaume-Uni attestant que j’étais bel et bien un citoyen européen. Que faire?  Nous vivions à Londres, je doutais que le maire puisse m’aider. Quoi qu’il en soit, nous sommes allés à la mairie et avons demandé une preuve de citoyenneté de l’UE. Le commis m’a alors demandé mon passeport. En le vérifiant, il s’est écrié : « Vous êtes un citoyen de l’UE! » et nous a renvoyés.  Nous avons donc trouvé un avocat expérimenté dans ce genre de dossiers qui a délivré un certificat spécial attestant que j’étais citoyen de l’UE. Comme je lui ai dit que nous en avions besoin au Portugal, il a ajouté un cachet de cire avec un sceau et a demandé à son partenaire de le contresigner. Voilà pour les deux signatures obligatoires!   Je suis retourné plus tard à Estremoz pour que le contrat de fourniture d’eau et d’électricité porte mon nom.  Cette fois, j’ai fièrement présenté ce certificat spécial.  Après un bref coup d’œil, l’employé au bureau en a fait une photocopie qu’il m’a demandé de signer (et qu’il a aussi signée). Puis, il m’a demandé tout bonnement : « Bien! Puis-je voir votre passeport à présent? »

J’ai depuis longtemps cessé de lutter contre la multiplication inutile de « papel », cette paperasserie à laquelle on ne peut échapper si l’on veut faire avancer les choses au Portugal.  Munis des trois classeurs pleins de certificats et attestations de toute sorte, nous nous sommes présentés à chacune des réunions, en espérant que les fonctionnaires ne nous demanderaient pas un nouveau document (hélas! cela arrivait!).


Les rénovations

Il a donc fallu attendre près d’un an avant d’assembler tous les documents nécessaires pour amorcer la reconstruction. Cela a été particulièrement long, car nous étions dans une zone d’intérêt historique et devions répondre aux questions des responsables de la conservation ainsi du conseil municipal.  

Le plus difficile a été quand nous avons reçu un « papel » de la part des responsables de la conservation interdisant la pose de fenêtres à double vitrage du fait que nous nous trouvions dans une zone d’intérêt historique.  Peu après, nous avons reçu un avis du conseil municipal nous informant que la « reconstruction » du bâtiment nécessitait, en vertu de la loi, l’installation obligatoire des fenêtres à double vitrage.  Tant mieux!  

Tant que l’on n’est pas pressé, les choses avancent… lentement (très lentement même), mais sûrement!

Nous en avons appris beaucoup sur la rénovation d’un vieux bâtiment portugais. On pourrait peut-être écrire un livre sur le sujet.  Par exemple, nous avons appris que l’approvisionnement en eau au sommet de la colline suffit à peine pour faire fonctionner une douche! Alors, comment faire si 8 personnes veulent prendre une douche bien chaude au même moment chaque jour?  Nous avons dû installer des citernes spéciales qui recueillent jour et nuit l’eau, puis la pompent jusqu’en haut de notre maison pour que tout le monde puisse prendre sa douche.  

La température du bâtiment est merveilleusement bien contrôlée, et ce, grâce à ses murs d’environ un mètre (trois pi) d’épaisseur.  Lorsque nous avons demandé à modifier l’emplacement d’une des portes, la réaction de découragement des entrepreneurs en construction était unanime.  Une fois le revêtement extérieur du mur brisé, l’on peut apercevoir une tonne de pierres empilées reliées par du ciment. Incroyable, non?  Ce type de mur tient la chaleur à distance l’été et la retient l’hiver.

En janvier 2017, l’entrepreneur en construction nous a avisés que tout serait terminé à la fin du mois de février. Finalement!  Deux ans plus tard, Vicki a démissionné de son poste pour s’établir définitivement au Portugal.  Tout a été achevé en novembre de la même année.  C’est aussi en novembre que nous avons officiellement ouvert notre petit hôtel.  Trouver un nom n’est vraiment pas facile. Faute de temps, notre petit hôtel porte le nom que nous lui avons donné depuis 2015 : « The Place at Evoramonte ».
 
La fin des préparatifs, le début d’une nouvelle aventure 

Enfin, Vicki pouvait s’occuper de la décoration et de l’ameublement.  L’ameublement est arrivé du Royaume-Uni dans un conteneur de 12 mètres (40 pi). Vicky a savamment agencé ce mobilier avec des objets traditionnels, fabriqués au Portugal.  Elle a aussi utilisé les objets que nous avions ramassés dans la soixantaine de pays que nous avions visités avant de nous installer dans l’Alentejo. Elle a su créer dans les chambres une décoration simple, rustique et moderne pour que les invités se sentent comme chez eux.

Nous étions désormais les heureux propriétaires d’un gîte comportant une mini-cuisine et trois chambres indépendantes, chacune donnant sur un balcon surplombant la campagne de l’Alentejo.  Un hébergement parfaitement situé pour admirer le coucher du soleil, quel que soit le moment de l’année.

Puis, nous avons reçu tout le nécessaire pour équiper notre café-bistrot qui pouvait à présent accueillir les gens. Nous étions fin prêts.  Le petit hôtel a ouvert ses portes et accueilli ses premiers clients en avril 2018. Mitch a enfin quitté Londres pour ouvrir les portes du Café à Evoramonte.

C’était parti!

Quelque cinq ans après avoir déniché l’endroit, The Place at Evoramonte voyait le jour!

Nous avons connu une bonne année 2018. L’année 2019 s’est révélée excellente! Notre rêve s’était enfin concrétisé!  Nous imaginions l’avenir, mais un événement imprévisible a bousculé nos plans : la COVID-19. Mais, c’est une autre histoire!


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